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La dette des entreprises françaises atteint des sommets

le 23 avril 2019

Les taux d’intérêt très bas peuvent-ils devenir « toxiques » ?

Une envolée de la dette financière de la part des entreprises

Les chiffres sont impressionnants. Au début de l’année 2019, le cumul de la dette financière brute des entreprises françaises a dépassé le chiffre impressionnant de 4.000 milliards d’euros. Peut-être que cela ne vous dit rien à première vue. En d’autres termes, si on rapporte ce chiffre au Produit Intérieur Brut de la France, on atteint 175% de la richesse nationale.

Partant de ce fait, on pourrait croire qu’il ne s’agit que d’entreprises où l’Etat est présent ? La réponse est négative. On trouve dans cette montée vertigineuse de l’endettement, des entreprises « publiques » mais aussi des entreprises « privées », parmi les plus prestigieuses du CAC 40.

La politique de la BCE, axée sur des taux très bas n’a pas que des vertus

Beaucoup d’économistes pointent du doigt la politique de la BCE (le « Quantitative Easing ») qui conduit depuis plusieurs années à des taux d’intérêt extrêmement bas, voire nuls.

En quoi cette politique pourrait-elle devenir toxique ? De prime abord, on pourrait penser que c’est une bonne politique. A court terme certainement. A long terme, cette politique de taux faibles ou nuls a des effets pervers qui peuvent susciter l’inquiétude et le chiffre impressionnant cité en début d’article est là pour nous le rappeler.

La notion de risque disparaît

Tout d’abord, les taux nuls font disparaître toute notion d’aversion envers le risque. On s’endette à « tour de bras » puisque cela ne coûte rien ou presque. Que se passera-t-il le jour où les taux reprendront une courbe ascendante, surtout chez des entreprises où la dette financière dépasse aujourd’hui les 60 Mds d’euros ? Et il y en a.

Les banques sont très fragilisées

Ensuite, une politique continue de taux bas finit par fragiliser les banques. Par exemple, le rendement du capital des banques de la zone euro a atteint 5 % en 2018, soit un niveau plus faible que le coût du capital en actions estimé à plus de 8 %. Ceci a plusieurs conséquences : les banques ne peuvent plus attirer des prêteurs en capital, elles manquent de fonds propres et ne peuvent plus prêter.

L’apparition des entreprises « zombies »

Enfin, une politique de taux zéro (ou presque), conduit à l’apparition d’un phénomène que les économistes ont appelé les « entreprises zombies ». Ce sont des entreprises qui ne survivent que grâce à la faiblesse des paiements d’intérêts sur leur dette.

Sur ce point, on commence à disposer de statistiques sérieuses. Dans les pays de l’OCDE, le nombre d’entreprises « zombies » est passé de 1 % en 1990 à 13 % aujourd’hui et l’explication la plus probante de cet état de fait, réside la forte baisse des intérêts payés par ces entreprises.

Ce problème suscite d’autant plus d’inquiétudes que les banques risquent de supprimer des crédits à une entreprise viable qui continuera ses activités, même après l’arrêt des crédits, mais elles hésiteront à le faire envers une entreprise « zombie » dont la faillite conduira la banque à provisionner le prêt qu’elle a consenti et donc, par là même, à diminuer ses fonds propres. Quel paradoxe !

En poursuivant sa politique sur la durée, la Banque Centrale Européenne semble ignorer les effets négatifs des taux d’intérêt bas qui se traduisent par un affaiblissement considérable des banques et par une multiplication des entreprises « zombies ».

Article rédigé par Michel TERNISIEN
Économiste et rédacteur pour Le Figaro et Les Echos

Marie TRAN

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